Pr Gilles DEVOUASSOUX

Le dossier du moment

Allergies, stress et dépression

man flu the struggle is real

Parole d’Expert

En cette période hivernale, le froid et le manque de lumière naturelle peuvent être à l’origine de ce que l’on appelle la dépression saisonnière. Ce concept, décrit pour la 1re fois en 1984 par le Dr Rosenthal, peut être à l’origine de symptômes tels que des troubles de l’humeur, des troubles du sommeil ou une perte d’appétit1, 2. Mais si ces symptômes ont tendance à disparaître au printemps avec le retour des beaux jours, il semble important de rappeler que la dépression en elle-même reste une affection très répandue. Ainsi, les dernières études épidémiologiques estiment que près d’une personne sur dix a vécu un épisode dépressif au cours des 12 derniers mois et plaident pour la mise en place d’une prise en charge spécifique, notamment chez les populations les plus vulnérables3. À ce titre, il a été démontré que la dépression était fréquemment retrouvée chez les patients atteints de maladies chroniques, y compris l’asthme.4

Les données concernant l’association asthme et dépression fluctuent selon les études et la co-prévalence de ces 2 affections varie entre 7,6 et 55 %4. 

Précisons également que les comorbidités psychiatriques sont principalement retrouvées chez les patients souffrant d’asthme sévère ou d’asthme non contrôlé. Ainsi, les symptômes dépressifs sont associés à une qualité de vie altérée, une augmentation des exacerbations et des hospitalisations, une augmentation des doses de corticostéroïdes…4-6
Enfin, les troubles dépressifs sont également corrélés à une mauvaise observance. Si les derniers chiffres estiment que moins de 50 % des patients asthmatiques suivent le traitement prescrit, il semble que le taux d’observance soit encore plus faible chez les patients asthmatiques souffrant de dépression4. Les symptômes dépressifs tels que désespoir et impuissance peuvent être liés à cette mauvaise observance4.
Bien que plusieurs outils soient disponibles pour le dépistage des troubles dépressifs, peu d’entre eux ont été validés au sein de la population asthmatique. Dans certains cas, il apparaît difficile de faire la distinction entre la dépression et les symptômes dépressifs chez les patients asthmatiques, ce qui peut conduire à une prise en charge erronée6. Il est donc important d’être attentif au risque de dépression chez ces patients5.
En cas de besoin, les patients doivent être adressés à un psychiatre ou évalués à l’aide d’outils de diagnostic psychiatrique spécifique à la maladie6.
Par ailleurs, des études ont également mis en évidence l’existence concomitante de rhinite allergique et de dépression. Ainsi, la rhinite allergique est plus fréquente chez les patients souffrant de dépression ou ayant des antécédents familiaux de troubles dépressifs. Enfin, un diagnostic pédiatrique de rhinite allergique est prédictif d’un trouble dépressif majeur ou de troubles bipolaires à l’âge adulte7, 8.

Les maladies respiratoires chroniques ne se limitent donc pas à des symptômes pulmonaires ou ORL et de nombreuses comorbidités peuvent être présentes. Et si la majorité d’entre elles disposent d’une prise en charge spécifique, les aspects psychiatriques bénéficient de moins de données. Des recherches complémentaires sont donc attendues pour évaluer l’impact des troubles dépressifs sur ces maladies et améliorer la qualité de vie des patients.

 

Documents et liens utiles

  1. INSERM – Dépression, mieux la comprendre pour la guérir durablement. 2014 https://www.inserm.fr/information-en-sante/dossiers-information/depression (site internet consulté le 18/01/2019)
  2. Rosenthal NE, et al. Seasonal affective disorder. A description of the syndrome and preliminary findings with light therapy. Arch Gen Psychiatry 1984; 41(1): 72-80. https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/6581756 
  3. Léon C, et al. La dépression en France chez les 18-75 ans : résultats du baromètre santé 2017. Bull Epidemiol Hebd 2018; (32-33): 637-44. http://invs.santepubliquefrance.fr/beh/2018/32-33/pdf/2018_32-33_1.pdf 
  4. Mangold R, et al. Factors associated with depressive symptoms in uncontrolled asthmatics. J Asthma 2017; 55(5): 555-60. https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/28759275 
  5. Ahmedani BK, et al. Examining the relationship between depression and asthma exacerbations in a prospective follow-up study. Psychosom Med 2013; 75(3): 305-10. https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/23440228 
  6. Halimi L. La dépression et l’anxiété dans l’asthme et la BPCO. La lettre du pneumologue 2009; 12(4-5): 86-92. http://www.edimark.fr/Front/frontpost/getfiles/15655.pdf 
  7. Amritwar AU, et al. Mental Health in Allergic Rhinitis: Depression and Suicidal Behavior. Curr Treat Options Allergy 2017; 4(1): 71-97. https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/28966902 
  8. Nanda MK, et al. Allergic Diseases and Internalizing Behaviors in Early Childhood. Pediatrics 2016; 137(1): e20151922. http://pediatrics.aappublications.org/content/137/1/e20151922 

Pr Gilles DEVOUASSOUX

Pneumologue (Hôpital de la Croix Rousse - Hospices Civils de Lyon)

 

Cas Clinique

Pr Gilles DEVOUASSOUX

Asthme, dépression et anxiété : tout est lié

L’anxiété, la dépression ou les troubles anxiodépressifs sont fréquemment retrouvés chez les patients atteints de maladies respiratoires chroniques.

Pr Gilles DEVOUASSOUX
Lire Plus

Publication commentée

Pr Gilles DEVOUASSOUX

Asthme et allergie : facteurs de risque de tendances suicidaires chez les jeunes adultes ?

Au cours des dernières décennies, l’évolution de la société et du mode de vie a profondément modifié la nature même de l’adolescence et du début de la vie adulte aux USA.

Pr Gilles DEVOUASSOUX
Lire Plus

Point de vue du patient

Pr Gilles DEVOUASSOUX

Allergies, stress et dépression

Analyse statistique des conversations faites sur le Web.

Lire Plus

Fiche Pratique

Pour vos patients